L’Annonce de Marie-Hélène Lafon, éd. Buchet-Chastel.
Paul passe une annonce, Annette va y répondre. Tous les deux ont envie de réussir cette rencontre. La ferme, le Cantal, la famille, sont toujours au cœur de cette narration. Une campagne que l’on découvre avec respect et intérêt. Ce livre à l’écriture sublime est très agréable à lire. Il ne se passe presque rien et pourtant on est pris par la vie de ces gens. Un texte inspiré.
B.W. de Lydie Salvayre, éd. Seuil.
BW, deux initiales qui désignent une « vraie personne ». BW c’est Bernard Wallet, ancien éditeur, grand lecteur, perd la vue. Durant le traitement (opérations, soins), BW se confie à sa femme, narratrice-auteur, lui raconte sa vie de voyageur et d’amoureux des livres. Lydie Salvayre : « Je n’ai pas eu le choix. Pas une seconde, je n’ai prémédité ce livre. Il m’est tombé dessus. Comme la foudre. » L’auteur toujours prompte à interroger la fiction, à exiger d’elle de brasser dans une même fureur la langue et l’aujourd’hui.
Des hommes de Laurent Mauvignier éd. de Minuit.
« Des hommes s’ouvre comme un film de Maurice Pialat : nerveux, élastique, ravageur, le premier chapitre pourrait faire un roman à lui tout seul tant la déflagration est assourdissante. M Landrot » (Télérama) « Un livre sur le silence que l’on rompt pour la première fois. La fiction du roman libère la parole. » (V. Josse, France Inter)
Un roman, pas un témoignage de plus. 28 mois « d’évènements » c’est long quand même ! Et peu d’explications convaincantes à ce jour. Le personnage du roman s’appelle Feu de bois, aujourd’hui marginal. «cœur trop lourd, tout près de lui péter dans la gorge, comme il avait dit lorsqu’il avait commencé à parler; tu vois, il a dit, me péter dans la gorge à force, se resservant du vin et buvant à gros bouillons des gorgées qui auraient suffi à noyer deux ou trois portées de chatons». C’est par une scène de querelle en famille (thème cher à l’auteur) que l’on revient sur le passé de Feu-de-bois. Honte humiliation, secret.. «l’Algérie, on n’en a jamais parlé. Sauf que tous on savait à quoi on pensait lorsqu’on disait nous aussi on est comme les autres, et les animaux valent mieux que nous, parce qu’ils se foutent pas mal du bon côté». On sent un auteur inspiré, documenté jamais manipulateur, mais souvent obsédé par le style. La démarche de ce travail de fiction me semble éclairant et utile néanmoins je comprends que certains (tels le critique Philippe Lançon dans Libération s’agace de cette obsession stylistique citant l’ébriété d’un Faulkner quand d’autres citent Céline…(Pas si mal !). Chers lecteurs, j’espère avoir agacé votre curiosité pour vous inciter à lire ce livre que je vous recommande.
Marc Fauroux.
Trois femmes puissantes de Marie Ndiaye. éd. Gallimard
prix Goncourt 2009
Découvrez un des romans phares de cette rentrée 2009 ! «Un classicisme somptueux. Proust et Faulkner dialoguant sous des cieux africains. Marie NDiaye, prix Femina pour Rosie Carpe , publie un nouveau roman, divisé en trois histoires qui se répondent entre elles et qui oppresse autant qu’il éblouit le lecteur proprement médusé par la beauté de l’écriture. L’art d’un des plus grands écrivains, dont on est presque fier d’être seulement le contemporain, ne s’en trouve que plus grand, encore ». Le Point
Extrait :
Elle aurait aimé lui dire maintenant : Tu te rends compte, tu nous parlais comme à des femmes et comme si nous avions un devoir de séduction, alors que nous étions des gamines et que nous étions tes filles. Elle aurait aimé le lui dire avec une légèreté à peine grondeuse, comme si cela n’avait été qu’une forme de l’humour un peu rude de son père, et qu’ils en sourient ensemble, lui avec un rien de contrition.
Trois femmes qui ont en commun une histoire plus intime encore que des liens familiaux sénégalais. Ces femmes partagent « la force des faibles ». Le roman est traversé par les oiseaux qui planent tels les augures d’une vérité attendue. Roman à l’écriture maîtrisée mais néanmoins impactante pour moi : une liberté défendue bec et ongles au delà de la douleur par trois femmes Norah, Fanta et Khady Demba que je ne suis pas prêt d’oublier.
Marc Fauroux.
Hors champ de Sylvie Germain. éd. Albin Michel
Aurélien disparaît sans que personne ne s’en émeuve ni même ne s’en aperçoive. Il devient invisible pour sa compagne comme pour sa propre mère. Personne ne fait plus attention à lui. Il glisse dans le flou. Un mal si contemporain. A la manière de ces clandestins de nos villes sortis de notre champ de vision. Apparaît un livre inquiétant. Marc Fauroux
« En phrases-ricochets lumineuses, Sylvie Germain sonde le gouffre a priori insupportable d’un monde où nous n’existons plus pour personne. Et grâce à son écriture si claire, sa pensée si généreuse, si curieuse, ce monde-là reste beau et paisible. Avec une étonnante sagesse, Sylvie Germain apprend le détachement. » (F. Pascaud, Télérama)